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DES CENDRES DANS LA VALLEE : Chroniques Népalaises

A lire en écoutant
 MIDLAKE - Children of the grounds
 Non, dans la vallée de Katmandou on ne se souci pas du temps qui passe... parce que seul la vie importe...

 

Pour peu qu'on en ai le temps (et la curiosité), la visite de la vallée de Katmandou est un vrai régal. Architectural, culinaire, iconographique, humain... nous sommes une fois de plus en présence d'un véritable trésor du patrimoine culturel Népalais. De charmants bleds attendent paisiblement les routards à à peine quelques dizaines de kilomètres de Katmandou. Si les trois anciennes cités-Etats rivales (Katmandou, Patan et Bhaktapur, qui se sont disputées la suprématie du Népal il y a de cela des siècles) s'atteignent facilement d'un coup de taxi, certains hameaux plus éloignés nécessitent un ride en bus. Ou, pour ne pas se laisser aller après tout ces momos, de bonnes chaussures de marche pour un peu de trekking! Un voyage dans le Népal profond, dans le Népal qui se lève tôt, bref dans le Népal d'un autre âge... Bienvenue dans la vallée où les cendres d'une ancienne culture sont encore ardentes!

 

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Centre d'artisanat important, l'ancienne ville royale de Patan ne se trouve qu'à 5 petits kilomètres de Katmandou. C'est donc d'un coup de taxi, avec copine Josefine (la Suédoise rencontrée sur les chemins de l'Everest), que nous partons, le temps d'une journée, à l'assaut de "Lalitpur" ("la cité de la beauté") et de son Durbar Square. La différence avec la capitale est assez frappante : de si bonne heure, tout est tellement plus calme qu'à Thamel! Pas un seul abruti qui tente de nous fourguer de l'herbe ou de nous embarquer dans son taxi. Nous déambulons tranquillement de places en places par de magnifiques petites ruelles pavées où pas un seul abruti ne nous klaxonne pour qu'on s'écarte... Nous marchons parmi les femmes Népalaises qui, de bon matin, viennent remplir leurs jarres d'eau dans les nombreuses fontaines de la ville. Puis nous arrivons à l'enchanteur Durbar Square de Patan : nous y trouvons un ensemble de temples bien plus propre, moins agité mais tout aussi beau que celui de Katmandou. Une fois de plus il me faudrait plus de place pour vous compter l'histoire de chaque temple (impressionnant travail artisanal sur le temple de Vishnu, en pierre et en bois) ou la légende qui accompagnant chaque statue (le jour où l'oiseau posé sur la tête de la statue du roi s'envolera, ce dernier mourra)...

 

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Temple à ciel ouvert encastré dans les contrebas du sud de la vallée, Dakshin Kali est devenu un endroit touristique à cause des sacrifices d'animaux qui y sont effectués tous les samedis, afin de calmer la soif sanguinaire de la Déesse Kali (et pour faire en sorte que ce jour, considéré comme néfaste au Népal, se déroule peinard). On slalome donc entre des milliers de Népalais en file indienne (promis je n'exagère pas, les Népalais font la queue pendant des heures pour sacrifier un de leur animal) pour atteindre les grille du temple. Derrière ces derrières, d'un coup de machette, les sacrificateurs décapitent canards, poulets et chèvres (mes préférés!) sans aucune retenue. Les pieds dans des flaques de sang et de boyaux, les décapiteurs travaillent à la chaine : le tout est peut être impressionnant visuellement (et encore) mais totalement dépourvu de rituels religieux et de charges émotives. Pour ceux que des photos plus sanglantes intéressent, me contacter en privé. Et pour ceux que ce rituel religieux révolterait (au moins par principe), rassurez-vous il y a un temple végétarien à quelques centaines de mètres de là : on y sacrifie des fleurs et des légumes!

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Sur le papier, Pashupatinah (déclaré site du patrimoine mondial par l'UNESCO en 1979) est un lieu hautement sacré pour la religion Hindou dont l'importance est comparé à celle du Vatican pour les chrétiens. Une fois sur place il est cependant difficile de se rendre compte de cela, tellement l'endroit est dégeullasse. La rivière sacrée qui borde la place principale, la Bagmati (qui est au Népal ce que le Gange est à l'Inde), est salement polluée et beaucoup de temples et de stèles sont en état de délabrement avancé. On comprend vite que le prix du billet d'entrée ne va pas forcément là où il servirait le plus. Pourtant il s'agit bien d'un haut lieu de spiritualité qui ramène des pèlerins de tout le sous-continent indien. C'est sur les 11 ghats qui s'alignent le long des rives de la Bagmati que les enfants en peines (le fils ainé pour le père, le cadet pour la mère) viennent allumer les bûchers de crémation qui délivrent leurs parents de leurs enveloppes corporelles, avant de se retirer pour une traditionnelle période de deuil de 13 jours dans un monastère (pour prier et festoyer). Infesté de singes, de chiens errants et de faux saddhus, l'atmosphère n'est pas aussi impressionnante que ce à quoi on pourrait s'attendre. Bien que l'on soit loin des ambiances colorées et animées que l'on trouve d'habitude dans les lieux de culte népalais. Le temple principal, réservé aux Hindous ou plutôt interdit aux touristes, est dédié à Shiva alors que le reste des édifices sont consacré à diverses divinités. S’il est impossible de rater les nombreuses représentations phalliques de Shiva, les magnifiques fresques élaborées du temple de Ram, le superbe temple de Gorakhnath ou le curieux cimetière (pour les castes n'ayant pas droit à l'incinération) dont les stèles funéraires parsèment un chemin en forêt sont à ne pas rater.

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Bodhnath, autre site inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, est un des plus grands sanctuaires bouddhistes de la vallée. Datant du 5ème siècle, on ne peut que rester sans voix devant le gigantesque stupa qui s'élève au milieu de la place principale! Entouré de centaines de moulins à prières, de prayers flags multicolores qui virevoltent au vent et de nombreux monastères Bouddhistes, l'endroit en jette. Définitivement. Si la place fourmille de vie en journée, l'ambiance change radicalement en fin d'après-midi lorsque les touristes ont plus ou moins déserté l'endroit et que les boutiques ont fermées. Les Népalais se pressent au stupa pour le circuit rituel autour du dôme principal et ses 4 paires d’yeux qui voient tout. C'est sans aucun doute dans la noirceur de la nuit que j'ai le plus apprécié l'endroit : le sanctuaire se pare d'une atmosphère presque mystique alors que le stupa reprend un semblant de vie grâce aux lumières vacillantes des bougies-lanternes, aux cliquetis répétés du tournoiements sans fin des moulins à prières et aux mantras psalmodiés par les moines. Magique.

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C'est une envie soudaine de Momo pour le lunch qui me fait sauter du bus à Sankhu. Une envie de Momo et une envie de vomir, entassé comme des sardines que nous étions une fois de plus dans ces satanés bus locaux Népalais où personne ne connait la signification du mot "déodorant". Arpentant la ville à la recherche d'un rade pas trop cher pour me relaxer en m'enfilant une dizaine de ces succulents "raviolis à la vapeur", me voilà surprit par l'atmosphère typique du village. Se dressent tout autour de moi des maisons typiquement Népalaises, dans le plus pur style Newar, avec briques rouges apparentes et encadrements de fenêtres en bois sculptés. Rien de révolutionnaire, certes, ce genre de bâtisses se croisent ci et là dans la vallée. Mais là, à 20 bornes de Thamel, pas un cyber café, pas un seul resto à l'occidentale et pas un touriste à l'horizon. Si ce n'est un sympathique belge croisé au temple de la déesse Vajra Yogini. Une petite pause pittoresque de quelques heures dans la vie quotidienne du Népal rural. Et de succulents Momos!

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Grosse déception par contre que mon passage à Nagarkot. Vendu comme un agréable village avec une vue mythique sur l'Himalaya (on promet quand même un panorama avec à l'ouest le Daulaghiri et à l'ouest l'Everest) j'ai eu la malchance d'y atterrir alors que les nuages ont élus domicile sur l'horizon depuis plus d'une semaine (et ne semblent pas vouloir en bouger). Pas de vue mais pas de charme non plus. Le "village" est en fait constitué d'une route en terre bordée par une succession d'hôtels plus tape à l'oeuil les uns que les autres. Bref, Nagarkot, j'ai vu je n'ai pas aimé et, le temps d'enfiler chaussure de rando et backpack, je m'en suis tiré vite fait.

Une déception vite oubliée par le magnifique combo Panauti/Namobuddha. Après une journée de trek entre les rizières de la vallée, première étape à Panauti. Ce bled séduit directement par son architecture et son authenticité. C'est dans des rues où la vie à la népalaise bat son plein que l'on découvre les vestiges de cet ancien royaume Rana et les ruines restaurées (à l'initiative d'un groupe d'historiens français) de cet ancien centre religieux. Des rues désertes de touriste où l'on se perd en contemplant temples, stupa et autres bâtiments typiques. Une bourgade dans le même esprit que Sankhu, quoi que légèrement plus active.

Seconde étape, petit coup de cœur : le tranquille hameau de Namobuddha m'a presque donné envie de tout plaquer pour me convertir en moine bouddhiste. Accueillie par un resplendissant stupa et son collier de moulins à prière, impossible de ne pas apprécier le calme et l'atmosphère perdue du lieu et son resplendissant monastère (l'endroit n'a qu'une quinzaine d'année). La légende raconte d'ailleurs que ce monastère Bouddhiste s'élève à l'endroit où Bouddha s'est sacrifié en donnant sa chair à des bébés tigres orphelins d'une mère tuée par un chasseur... devenus grands et forts les tigres prirent leur revanche en dévorant le chasseur. T'aurais pas dû déconner avec les tigres mon pote!

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Vendu aussi comme un bled à la vue imprenable sur les montagnes de l'Himalaya, je n'ai guère été plus chanceux qu'à Nagarkot. Si ce n'est que contrairement à cette dernière, la cité de Dhulikel est authentiquement newar et ne se contente pas d'accueillir des touristes alléchés par la vue. Une relaxante retraite de deux jours où, pour ne pas changer, j'ai flâné de temples en monastères et sauter à pieds joints dans la vie à la Népalaise. Je ne m'en lasse pas, sérieux.

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Dernière étape, et quelle étape, l'ancienne citée royale de Bhaktapur, définitivement la plus resplendissante des villes de la vallée! Le prix d'entrée peux sembler excessif (1100 roupies) mais la politique de conservation du patrimoine et le cadre rural que l'on y découvre sont deux raisons suffisantes pour s'en acquitter. Un prix d'entrée qui explique aussi pourquoi les rues de Bhaktapur sont tout simplement étincelantes comparées à la saleté ambiante de Katmandou. Pendant longtemps la plus puissante ville du Népal, "la cité des dévots" a conservé un aspect médiéval et, même après 4 jours à les arpenter, je ne me suis pas lassé des ruelles pavées serpentant entre les basses maisons en brique rouges. Mais aucuns superlatifs n’est assez fort pour traduire la beauté authentique des éblouissantes places (les Tole) que l'on découvre à Bhaktapur.


Le Durbar Square offre de superbes temples et des statues tellement belles que le monarque les ayant commandé aurait ordonné que l'on coupe les mains de l'artisan les ayant réalisés (pour ne pas qu'il en sculpte d'aussi belles pour une autre ville). La pittoresque artère commerçante qui mène à la place Dattraya est presque plus envoutante que la place elle même. Comme pour Durbar Square, le moindre détail, la moindre statue, la moindre fenêtre possède ici sa propre histoire. Les artisans potiers, les étalages du marché et les draps étendus à même le sol -sur lesquels sèchent riz et osier- ne font que renforcer l'atmosphère médiévale de la ville et s’il n'y avait pas d'autres "blancs", je suis sûr qu'on serait en présence d'une scène Népalaise du passé. Mais, sans hésitation, c'est la place de Taumadhi Tole qui est la plus impressionnante. On y trouve le monumental temple de Nyatapola, un des derniers temples à cinq toits superposés du Népal. Perché en haut d'un raide escalier bordé d'immenses statues, ce temple fût édifié en 1708 pour calmer la colère de Bhairav (dont les épidémies décimèrent à l'époque la population de Bhaktapur).

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L'exploration de la vallée de Katmandou, autrefois un immense lac piégé par les montagnes himalayennes, fût l'occasion de sortir de Thamel et de prendre repos de l'agitation de Katmandou. Et dieu sais que ça fait du bien. L'occasion aussi de découvrir un peu plus la culture du pays, une culture probablement moins "gâchée" par le tourisme dans ces endroits reculés. J'ai croisé cent fois moins de touristes dans la vallée que pendant mon trek dans l'Everest. Véritable musée vivant, à pied, à vélo où en bus local, impossible de ne pas apprécier l'ambiance médiévale de certains villages et le pur régal qu'est la convivialité à la Népalaise. Des Népalais avec qui j’ai appris à communiquer sans parler... avec qui j’ai apprit qu’apprécier la vie n’est pas qu’une question de richesse matérielle... des Népalais qui n’ont pas grand-chose mais qui sont heureux de partager un peu de riz. Malgré l’incompréhension qui provient de nos différences culturelles (prendre des photos pourquoi faire? Des piercings ça sert à quoi? Si tu aimes le Népal pourquoi veux-tu en partir?), échanger avec les quelques Népalais croisés sur la route de la vallée est une des expériences les plus intéressantes que j’ai vécues. Népal, quelque chose me dit que l'on se reverra bientôt...

 

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  La vallée de Katmandou c'est
Un lieu à ne pas manquer : la royale ville de Bhaktapur, définitivement la plus authentique cité newar que j'ai visité
Un lieu à éviter : Nagarkot parce que des villes sans autres intérêts que le tourisme je les vomis
Un livre : Dieu en prison à Katmandou, premier ouvrage de Samrat Upadhyay, jeune auteur népalais. Ce recueil de nouvelles porte un regard intéressant sur le Népal moderne, qui tente de concilier modernité et traditions.
Un plat à dévorer : Même si je ne suis pas vraiment fan de yaourt amer, le Dahi (ou King Curd en anglais, spécialité de Bhaktapur) est un vrai délice...
Une phrase qui a été dites : La vallée de Katmandou a été classée par l’UNESCO parmi les sites à sauvegarder en tant que patrimoine de l’humanité. Bravo, mais s’il fallait restaurer et protéger toutes les œuvres d’art qui, à court terme, risquent la mort en ce jardin himalayen, le budget de la nation népalaise y passerait tout entier (Jean Ratel)

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