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TUKTUK DRIVER : Chroniques Thaïlandaises

A lire en écoutant
ALEXANDER - Bad bad love
 Chauffeurs de tuk-tuk, j'aime vous haïr!

 

Récurrence réconfortante d'un pays à l'autre ou endoparasite culturel, la réponse importe peu. La seule vérité c'est que du Népal jusqu'à la Chine, le tuk-tuk est un élément indissociable de la culture asiatique. Nul ne peut rouler sa bosse sans faire appel à ses services. Tantôt sympathiques, pleins de bonnes volontés et d'une aide précieuse; tantôt oppressants, irrespectueux et irritants, ces taxis bons marchés ont depuis longtemps envahis villes et villages d'Asie. Et leurs chauffeurs hantent, nuits et jours, de leur présence presque fantomatique, la moindre ruelle de ce continent. Tels de revanchardes réincarnations de Travis Bickle, héros de la mythique œuvre de Martin Scorsese, ces individus sans foi ni lois traquent sans cesse touristes et backpackers prêt à les aider... ou à les arnaquer de quelques dollars si l'occasion se présente! Vous avez sans doute remarqué que ces tricycles motorisés me poussent à une foule de ressentiments à l'image du comportement paradoxal de leurs chauffeurs : un jour ils m'inspirent une haine profonde, le lendemain une admiration photogénique certaine. Une haine-amoureuse qui s'est cristallisée, en quelques minutes, dans la chaleur d'une chaude journée à Bangkok.

 

Once upon a time in Bangkok. Je venais de récupérer Paula, tout juste débarqué du Népal, et alors que nous cherchions un moyen de rejoindre le centre ville, un tuk-tuk nous apostrophe de la manière assez rudimentaire qui les caractérise tous : "tuk-tuk?". Cela aurait pût être une course comme une autre, mais c'était sans compter sur un invité de dernière minute. Un pote au chauffeur qui s'installe à l'arrière avec nous, une bière -probablement pas sa première- rivée à la main. Avec la simplicité naturelle des asiatiques et le franc parlé légendaire des gens alcoolisés (qui m'inspire beaucoup de sympathie, moi même ayant parfois tendance à me laisser aller aux joies de l'éthanol), il me fait rapidement part, à moitié mort de rire, du surnom que mon faciès maintenant recouvert d'une épaisse barbe lui inspire : "you have a face like a monkey face my friend". On se regarde. On se marre. "Beaucoup" de sympathie? C'était peut être un peu exagéré quand même! Mais M. Bière ne s'en arrête pas là. Il formule à voix haute le hold-up dont il me juge responsable en demandant à Paula, d'une manière authentiquement sincère : "how possible you like a princess you are with a monkey face?". Ok on a comprit l'idée mec, merci! Le chauffeur rajoute son grain de sable à ma destruction morale : "You are lucky to have a pretty woman with your monkey face haha!". Mon seul soutient potentiel, la woman en question, ne s’est pas retenue longtemps et reprend avec eux le refrain meurtrier : "monkey face hahaha, you monkey face my friend". Mais c'est l'aveu final de M. Bière qui sonne le glas de ma pénitence : "you know monkey face, you and me same same. Me not pretty, me drink beers all day but I have beautiful wife. You and me, same same"... You talkin' to me? Retenez-moi où je l'étrangle! You talkin' to me MF?

 

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Après avoir cramé plus de cash que de raison sur le sable crissant des plages du golf de Thaïlande (la faute aux orgasmes -une mesure de Bailey, une de Kahlua, une de Malibu et une de crème, un glaçon on remue et on déguste), c'est maintenant l'heure de me remettre à cramer les semelles de mes Converses. Je resserre la casquette, fait valser le sac sur mon épaule droite et ajuste les lunettes de soleil. Un petit coup d'oeuil approbateur à Miss Paula et nous grimpons sans plus attendre dans le bus qui nous délivrera de l'emprise de Bangkok. Plus rien ne nous retiens ici. Mais avant de reprendre chacun de notre côté le court de nos vies -la demoiselle intègrera bientôt une école pour devenir professeur de Yoga- on s'embarque pour une dernière virée, vers le nord de la Thaïlande. Vers les ruines de ses temples et les restes de ses champs d'opium.

Lorsqu'il y établit la capitale de son royaume, en 1350, Ramathibodi Ier roi des Siams pensait que les eaux entourant "l'île" d'Ayutthaya la rendraient intouchable. "Qui ne peut être conquis", signifiait en sanskrit le nom de son royaume originel. L'histoire lui prouva malheureusement le contraire lorsque l'armée Birmane du roi Hsinbyushin réduit à néant sa magnifique cité, en 1767. De cette guerre dévastatrice il ne reste que des détails historiques. Des détails historiques et les ruines des centaines de temples, de stupas et de statues de Buddha qui jadis firent la fierté du peuple. C'est ainsi dans le Parc Historique d'Ayutthaya que les touristes peuvent découvrir tous ces trésors anciens, tous ces stigmates archéologiques d'un passé glorieux qui se dressent ci et là au milieu du béton et de l'asphalte de cette "banlieue" de Bangkok.

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La ville d'Ayutthaya, reconnu par L'UNESCO comme patrimoine mondial, a ça pour elle qu'elle relaxe. Sur tous les points on est loin des excès en tout genre de Bangkok. Premièrement, l'atmosphère est loin d'être rock'n roll (pas une seule daube R'N'B crachée par des enceintes en 4 jours, un putain de record pour la Thaïlande) et, coincée entre quatre murs d'eau, la vie quotidienne y est bien moins effervescente. On vit au rythme des marchés et de leurs pécheurs. On aime se perdre en barque sur les eaux de la Mae Nam Lopburi pour observer les moines se baigner et s'amuser avec les gamins du coin. Parfois même y voir des goanas, ces gros lézards jaune tachetés de noir. Et, surtout, on se surprend à éprouver de la sympathie pour un chauffeur de tuk-tuk qui nous ramène, aidé seulement d'une photo, à l'auberge après que l'on se soit aventuré n'importe où n'importe comment sans la moindre carte de la ville.

Deuxio, en plus de l'intérêt historique qu'elles représentent, les ruines d'Ayutthaya offrent aussi une alternative bienvenue à la frénésie des temples qui frappent quiconque visite Bangkok. Parce que faut bien le reconnaitre, aussi beaux et colorés soient-ils, on est souvent proche de l'overdose après une semaine! C'est donc presque ravit que l'on accueille ces témoignages de chaos religieux. Avec un peu de recul je me rends maintenant compte que la chose la plus curieuse ici, ce sont les deux villes qui, encore aujourd'hui, se côtoient et se superposent à travers le temps et l'espace. Au milieu de l'Ayutthaya du 21ème siècle -et ses temples étincelants alignant des Buddhas par centaine- se dressent les restes de l'Ayutthaya du 13ème siècle -des temples sans toits alignant des Buddhas démembrés par centaine.

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Un arrêt bien plus anecdotique à Phitsanulok. Bien qu'exempt de touristes, il n'y a pas grand chose à y faire, mise à part se faire dévisager par les locaux. Et une statue de Buddha âgée de 800 ans... c'est une bien maigre récompense après avoir sauté du train en pleine nuit pour se faire enfler 60 bahts par un tuk-tuk qui nous conduit en moins de 30 secondes à notre guesthouse... de l'autre côté de la gare... Enfoiré!

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C'est Chiang Mai qui est le dernier arrêt de ce petit périple me rapprochant de la frontière Laotienne. Avec les longues douves et les hautes fortifications qui l'entourent, cette ville moderne et bien aménagée frappe par son cadre chaleureux. Mais la cité n'est pas en reste niveau tourisme, puisqu'elle propose aussi une grande variété d'activités. Se découvrent ainsi à Chang Mai deux des statues de Buddha les plus vénérées du pays (une de marbre et une de crystal, à Wat Chiang Man), un stupa datant de 1404 (Wat Chedi Luang) ou encore un magnifique temple entièrement construit en bois (Wat Phra Singh, le temple que j'ai préféré jusqu'à présent). On peut aussi partir en trek, faire du rafting, de la tyrolienne, pratiquer l'escalade, s'initier à la préparation des délicieux plats Thaï ou prendre des cours pour passer pro dans l'art du massage. Et j'en oublie, probablement. Personnellement, ne m'en voulais pas, mais j'ai préféré déguster la bouffe, et m'allonger pour me faire masser (non mon Kéké, pas la peine de me demander comment ça s'est terminé).

Mais la ville a des airs bien trompeurs. Hydre à deux têtes de la Thaïlande, l'atmosphère calme et irréprochable de la journée n'est souvent que le prélude à une vie nocturne bien débridée, proche de celle de DSK. Si j'avais échappé à cette mascarade à Bangkok -racolage ping-pongiesque mise à part- c'est à Chang Mai que je fût pour la première fois témoin de la prostitution banalisée qui se déroule en toute impunité en Thaïlande. Deux serveuses (moches et vieilles) pour les boissons, quatre nénettes (jeunes et bien foutu) pour le sexe. En gros c'est le schéma de base. Les touristes, des hommes de tout âge, n'ont plus qu'à s'installer dans ces bars qui proposent de "la bière, du billard et du plaisir" jusque sur leurs enseignes. D'un regard ils choisissent celle qui leur convient et après un rigolo numéro "on fait connaissance autour d'un verre ou deux" s'en vont tranquillement bras dessus dessous, vers de vertes parures de lit. J'en ai même vu un qui montrait des photos de sa femme et de ses enfants à sa dulcinée d'un soir. Sick!

Si je fus aussi témoin de la vente de fille sur catalogue (un chauffeur de tuk-tuk me tend une feuille plastifié avec 6 portraits et me demande si une m'intéresse pour la nuit), c'est sans doute la malheureuse mésaventure d'un jeune anglais qui remporte la palme. Un jeune homme apparemment bien sous tout rapport que la perspective du plaisir charnelle ne semblait pas emballer plus que ça. Plus attentionné avec sa pinte de Chang qu'avec les callgirls, il provoqua la colère de la tenancière en refusant les avances de "ses filles". "You not want my girls? You are gay or what? Hoooo, don't do masturbation at your hotel, don't do masturbation!!". Voilà ce que c'est vu envoyé à la figure ce client qui, en fin de compte, n'en été pas vraiment un...

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Avant de clôturer cet article, un conseil : si l'envie vous prenez d'embarquer pour le pack "Golden Triangle in one day" (proposé par toute les agence de Chiang Mai), oubliez ça! Censé vous faire faire le tour de la région montagneuse ou se rencontre Birmanie, Laos et Thaïlande (séparés par les bras d'eau du Mékong), la journée se résume finalement à beaucoup d'arrêts shopping et peu de sightseeing. Mise à part le White Temple, ses centaines de têtes de mort, ses statues de Predator et son "mur des péchés" (un immense mur ou s’alignent des images de Star Wars, de station-essences, de bouteille d'alcool et de Matrix... des illustrations vraiment chelou pour un monastère Bouddhiste... j'ai toujours pas tout saisi) le coin, célèbre pour avoir été une région où les tribus vivaient de la récolte d'opium, ne vaut pas le coup. Ou du moins, pas avec ce tour là! Et sachez que les soit disant tribus que l’on vous amène voir (notamment les "long neck") vivent ici pour le boulot : ils payent un loyer pour dresser le décor -leurs "maisons en paille" (mais ils ne vivent pas dedans)- et pour recevoir l’argent des touristes qui les prennent en photos, ils ont besoin...... d’un permis de travail!

 

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C’est marrant parce que la Thaïlande est totalement à l’image de ce dernier tour organisé : on y trouve des endroits magnifiques et des choses passionnantes... auxquelles le tourisme de masse a malheureusement enlevé toute authenticité. La Thaïlande c’est un peu comme une rose qui commence à faner : ça reste joli mais on aurait aimé la voir au temps où elle resplendissait de toute sa beauté, sans les rides du temps. Ici ce sont les rides du tourisme -"Koh San Road", "prostitution" et "agences de tourisme"- qui ternissent le visage angélique du royaume. C’est un sentiment un peu frustrant que je n’avais jamais ressenti auparavant (comment se sentir frustré de cette manière dans un pays comme l’Australie qui n’a aucune culture et une "histoire" tellement récente?). Mais qu’importe, cela n’empêche pas d’apprécier les magnifiques temples (ou leurs ruines), déguster les délicieux plats Thaï et prendre en photo ses magnifiques plages..... à partir du moment que ça ne dérange pas de le faire au côté d’autres touristes!

Les rencontres n'arrivent jamais par hasard, c'est un fait. Une petite pensée donc pour Miss Paula, ma compagne de route pendant 4 semaines dont l'histoire personnelle n'a fait que renforcer les convictions qui guident mes pas en direction de la France. J'espère de mon côté t'avoir redonné un peu de confiance et, sincèrement, j'espère que tu trouveras ce que tu es parti chercher à traves le monde.

La route en sera encore pavée, mais je dédis cet article à tous les chauffeurs de tuk-tuk. Aux raclures qui ne te laissent pas respirer à la sortie des bus. Aux baratineurs de premières qui n'ont que "couturiers" et "ping-pong show" aux lèvres. Aux ceintures noires de l'arnaque aux tarifs. Et a ceux qui ont le cœur sur la main et aime discuter de leur culture avec les farangs. A ceux qui n'ont que le toit de leur tuk-tuk sur la tête à la nuit venue. Et à ceux qui aime encore accompagner les touristes aux pieds des richesses de leur pays. Loin d'être moins vivantes, les rues perdraient sans aucun doute une partie de leur âme sans
ces fétichistes du backpack

!

 

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  Le nord de la Thaïlande c'est
Un lieu à ne pas manquer : Ayutthaya et son magnifique coucher de soleil sur les silhouettes mystérieuses des ruines de Wat Chaiwatthanaram (rive sud)
Un lieu à éviter : Le tour organisé, merdique au possible, du Golden Triangle 
Un plat à dévorer : A Phitsanulok, au sud du Night Bazaar, se tiens au bord du fleuve un restaurant tout ce qu'il y a de plus banal... mais le calamar / oeufs en salade sauce cacahuète est juste une pure tuerie... Ha, et pour les fans du biscuit, ne pas rater l'Oreo Shake pour un voyage totalement réussi!
Une phrase qui a été dites : If there is nothing that you like, you must like the things that you have ("s'il n'y a rien que tu aimes, tu dois aimer les chose que tu a", précepte Bouddhiste)

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